On est tous notés...
Publié le 6 Mars 2008
Quand j'arrive sur mon blog, un graphique m'annonce le nombre de visiteurs, la fréquentation du site... oh, la, la... Je vais sur le blog des autres, je vois que ça semble être une préoccupation... suis-je assez lu(e) ? combien de commentaires ai-je eus ? comment me vendre ? comment être populaire ? Vais-je faire dans l'humour décalé, la provo affichée, l'intellectualisme parisien ou provincial... ? ou le "je m'en fous, je suis moi" ? non, moi ça ne me touche pas, je n'y avais d'ailleurs jamais songé, comme tu as les idées mal placées...
Pourquoi, pour qui, fait-on un blog ? Il paraît que les Français sont devenus les champions des blogs, eux qui étaient à la traîne pour internet, voilà qu'ils s'y sont mis... Et tout le monde a plein de choses à dire, à écrire... sur plein de sujets. Mais pour quoi ??? Ont-ils, ceux qui laissent des commentaires, a-t-on, seulement le temps (et l'envie) de lire ? Ne commente-t-on pas, seulement pour être lu ..?
Moi, je vais la faire très détachée : moi, j'écris pour moi... (ah bon, personne n'y a cru ?) peu importe qu'on aime ou pas, qu'on vienne, ou pas, sur mon blog...
On a besoin de se dire, d'être lu, apprécié, contesté...
C'est la découverte d'un univers. Vous écrivez... et soudain un éclairage inattendu, une réaction humaine et inconnue vient vous visiter... Quel pied !!!
C'est toute la magie (la drogue...) d'internet. Vous ouvrez cette fenêtre sur l'univers humain. Le potentiel, la liberté, sont immenses... A-t-on, l'humanité a-t-elle, jamais vécu ça auparavant ? Je dirai : oui. Du temps où les navigateurs sont arrivés aux nouveaux mondes, et qu'ils ont voulu dialoguer avec des peuplades absolument... inouïes, qu'ils ont pris le risque de communiquer avec l'inenvisageable...
Bien sûr on trouve de tout... mais la notation... le retour, est implacable! Il y a des cotes, c'est un marché (on a les petits graphiques qui nous le disent...). Mais, un marché de quoi ? Que vend-on finalement ? Beaucoup (la plupart ?) le font sans espèces sonnantes et trébuchantes à la clé... Alors, est-ce toujours cette vieille rengaine : "j'veux d'l'amour...", qui fait tourner la toile ?
Il y a des jeux de pouvoir, bien sûr, des coteries, bien sûr, des alliances, des ententes, tout ça se retrouve chez les blogueurs... (les blogueuses ? bon, c'est bientôt la journée internationale de la femme, alors, disons oui, aussi chez les blogueuses...).
Et pourquoi, Lucia, as-tu envie, ce soir, de parler de ça ?
Parce qu'à la fois ça me désole... ben oui, c'est comme ailleurs, la lutte du plus beau, du plus lu, du plus "commenté", du plus... la rivalité, quoi... (je n'ai pas dit que ça n'allait pas avec de la solidarité, de la complicité, de la sympathie, de l'empathie, de l'amoooouuur même... c'est-à-dire de la projection et de la reconnaissance), et, en même temps, je trouve que c'est absolument génial!!! car je crois que c'est la première fois que certaines différences sociales peuvent être effacées (physique, monétaire...), que certains écrans tombent... bon, il y a toujours la langue (et on en revient, j'en reviens, toujours à Bourdieu, car la distinction sociale se fait surtout par le langage : "Ce que parler veut dire"...), ceux qui écrivent bien, qui ne font pas de fautes (on va repérer ceux qui font bien l'accord du participe passé, ça c'est la super classe).
Est-ce à dire qu'on a chez les blogueurs : une majorité de profs, de secrétaires, d'assistantes... (parce qu'elles maîtrisent très bien la langue française), d'intellos (c'est-à-dire bac + 5... ???), se sentant incompris... ???
C'est dommage si on n'utilise l'outil que pour cela... que pour compenser des frustrations sociales. Je sais qu'en Chine il a été (depuis on l'a muselé) le porte-parole d'une opposition réellement spontanée.
Ici, en France... qu'est-il (l'outil) ? à quoi ça sert le blog ? qu'est-ce que j'en fais aujourd'hui, demain ? Est-ce la manifestation de mon égo ? de mon narcissisme ? seulement ? ou pourrais-je en faire, aussi, autre chose ?
Gracias a la vida... et parce que la seule réponse sera toujours : l'amour que je porte à un autre que moi... cette interrogation-là...
Mercedes Sosa : Gracias a la vida...
Mercedes Sosa : révolution... "Antiguo dueno de las flechas"