Blogs en fleurs, coloriage et épluchage de carottes

Publié le 4 Avril 2009


Ca ne prévient pas, ça arrive, ça vient de loin... ça s'est promené de rive en rive... chantait Barbara. Et ça vous tombe dessus : le Printemps.  Je me suis amusée à en observer les premiers signes dans le métro. Jeudi, fin d'après-midi, une frénésie avait saisi toute la gente féminine (en âge hormonal de pouvoir séduire...) qui se trouvait dans les deux wagons successifs où j'ai été (moi, la mine grise, et la semaine pesant déjà lourdement sur les paupières).

Une jeune maman, environ 37 ans, sa fille de 13 ans assise près d'elle, elle, la mère, décolleté plus que plongeant, blouson de cuir, bas noirs, talons aiguille, blonde, cheveux au carré, l'air "croqueuse d'hommes" ou "victime consentante"... difficile à dire, se penche régulièrement vers la "petite" qu'elle semble à la fois vouloir protéger et subjuguer. Elle entreprend de se maquiller consciencieusement. La fille, rêveuse, regarde devant elle, tenant entre ses lèvres un tube de fond de teint pris dans la trousse de maman. Puis, quand elle a eu fini, une jeune fille (la vingtaine), s'installe de l'autre côté de l'ado, sur un strapontin, et initie, elle aussi, ce rite auquel les femelles humaines se livrent, dans nos contrées, pour séduire les mâles : le coloriage de leur visage. La gamine semblait gênée, elle regardait sa mère comme pour lui indiquer : tu vois, toi aussi, tu as fait ça... La mère ayant le sentiment de ne plus être... la seule, sur ce terrain de la séduction déclarée, a jeté des regards vérificateurs à l'autre, la plus jeune.

Je change de direction, Belleville vers Châtelet, et là... rebelotte, une jeune (encore) Chinoise en train de refaire tout son portrait.

Zavez quoi les filles en ce moment ?

Les zormones ? Moi, ça me donne le rhume des foins, tous ces pollens qui volent. Surtout que ça m'a déjà beaucoup fait éternuer auparavant... j'y suis devenue allergique.

Faut dire que les garçons c'est pas mieux, en ce moment de l'année, eux sont obsédés par la recherche d'un nouveau parfum... Vous savez, quand un homme se met à changer de garde robe (et surtout à s'occuper de ses slips), à faire du sport, et que tout à coup le vélo devient essentiel... c'est (si vous vivez avec lui...) qu'il y a anguille sous roche, ce signe-là ne trompe pas : homme qui se soigne est homme trompeur, ou en chasse.

Et bien, moi zaussi, j'ai envie de le colorier le printemps !!!

J'ai fait provision de jeunes carottes, et en les achetant, dans mon magasin bio pour bobos (dont je suis) j'entends une femme (blonde encore) expliquer à un homme (noir lui) : "non, elles ne s'épluchent pas !", lui étonné, elle renchérissant comme si sa vie en dépendait : "non, on ne les épluche pas, ce n'est pas la peine". Elle lui disait à la fois, je sais, je sais mieux que toi, je suis la mangeuse de carottes, celle qui vit dans un pays où on mange de jeunes carottes, de plus je suis une femme, une éplucheuse de légumes, et donc... je peux te l'affirmer du haut de ma position de PDGère française de la cuisine française : les carottes nouvelles ne s'épluchent pas. L'homme n'a rien ajouté.

Dans ma classe l'autre jour nous avons lancé un débat sur le trafic de jeunes femmes de l'Est en Europe, et de jeunes Philippines au Maroc... J'ai demandé : "pourquoi ce sont toujours des femmes qui sont dominées, exploitées, tuées, battues, brûlées, réduites en esclavage ?". Un homme suisse (vivant en Ukraine, où il fait des affaires...) m'a répondu : l'exploitation, la colonisation, existe aussi dans l'autre sens, même si c'est dans une moindre mesure, il y a aussi des femmes occidentales qui vont en Afrique pour se trouver (et se payer) un homme.

Les femmes sont parfois des rivales les unes pour les autres, elles sont généralement beaucoup moins solidaires que les hommes entre eux. Pour battre une femme, pour tuer une femme, on a toujours beau jeu de s'appuyer sur d'autres femmes (ai-je besoin de vous donner un exemple ? Aubry contre Royal... vous aviez bien compris). On pourrait aussi montrer ce clip d'une fille fouettée par un taliban, les jambes tenues par sa mère (?) à comparer avec, dans nos contrées à nous, ces filles violées par leur père, sans que leur mère n'intervienne.

J'ai défendu ici, un mois avant sa sortie, La journée de la jupe, j'ai depuis toujours soutenu Ségolène Royal (et continuerai à le faire). Je sais que mes alliés sont des individus, des humains, pas homme ou femme mais humain, mais je sais aussi que les attaques me viennent plus souvent des femmes que des hommes. Je n'en apprécie que d'autant plus celles qui se sentant proches de moi m'apportent leur soutien.

Certains écrivains ont un blog... certains blogueurs rêvent de devenir écrivains... Certains écrivains ont renoncé face à l'agression de leurs pseudo-lecteurs (croyez-vous vraiment que tous vos commentateurs, ou ceux qui naviguent sur vos blogs, vous lisent vraiment ?) et ont fermé leurs commentaires. La lecture de l'internaute : un poème... Vous avez intérêt à écrire en phrases courtes, en paragraphes ramassés, en peu de mots... à chaque fois. Donnez-lui peu à manger à votre lecteur, il vous en saura gré...  Le lecteur-commentateur de blog veut se lire lui-même en vous : faites-lui ce plaisir. Faites court et laissez-lui de la place. Le problème est que lui, c'est vous...

Je grossis le trait !!! car de fait l'écrivain (sur papier, livre) n'a, lui non plus, aucune assurance d'être "bien" lu, et il suffit de voir Nolleau ou Zemmour éreinter sur F2 certains auteurs, pour comprendre que les critiques peuvent être sévères... Mais, j'ai rarement vu en société qu'on s'agressait tant, ou si ouvertement... que sur des commentaires de blog.

J'ai grossi le trait, car, que de beaux textes, que de belles âmes... frôlées, entrevues (lues). Ils cachent bien leur jeu, sous l'humour, le beau langage... (allant à la pêche au littéraro...), leurs mots d'esprit, je traque ce que nous dissimulons... : l'humanité. Que de beaux commentaires ici déposés, offerts; leur sensibilité, leur retenue... leur richesse parfois m'étonne, et m'a déjà aussi aidée à me relever... de mes peines.

Et puis... Souvent la critique nous parvient du silence.

"Je ne commente pas mais... je n'en pense pas moins", entends-je dans la nuit. L'ange passe et devient le démon qui me titille. Alors, face à mon écran, mon clavier... je souris, crie, et kidnappe le chef de mon blog, lui réclamant mon dû : la re-création.

Ou, comme ce soir : je me révolte et j'épluche les carottes nouvelles, en me laissant bercer par Misia... et son dernier disque (Ruas, trois fff dans Télérama), ça me permet de relire (et traduire) Pessoa... dans Autopsychographie, qu'elle chante souverainement  :

Le poète fait semblant, il feint tellement, qu'il en arrive à feindre que la douleur qu'il ressent est réelle... Et ceux qui lisent ce qu'il écrit, dans la douleur qu'ils lisent, sentent bien, non celles qu'il a eues, mais seule celle qu'ils n'ont pas
.

Et ici dans ce clip hautement suggestif, résumée, la guerre de nos sens, celle qui au printemps est exacerbée. "Garras dos sentidos" (griffes de nos sens) : je ne veux pas chanter l'amour, ni parler de ce qui le motive...






Voir, sur le thème des blogs d'écrivains, cet article de Telerama.

Lire, dans Vendredi, (pour de vrai, sur du papier, ou sur le
Net...) la publication d'extraits de certains blogs, et le texte essentiel de Philippe Meirieu sur La journée de la jupe. (j'ai trouvé amusant que sur toute une double page, consacrée au film, et excepté en légende d'une photo, aucune fois le nom d'Isabelle Adjani n'a été cité dans le corps des textes).

Aller, sur le blog de Philippe Meirieu, ici.

Rédigé par Luciamel

Publié dans #Politique - société

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L
@Nina : telles des fleurs à butiner, elles attirent les abeilles de leur parfum, de leurs couleurs aussi (même la nature s'y met au coloriage, c'est dire).
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N
C'est vrai que c'est le printemps. Les femmes en profitent!
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L
@Noèse : merci pour ces paroles d'amitié , je me dis, en effet, que nous sommes sans doute bien souvent le jouet de nos hormones (sexuelles ou autres), mais ne soyons pas ingrate car elles viennent aussi nous faciliter la vie (merci chères endorphines). Le matriarcat ? on va de toute façon vers un monde différent (ou point de monde du tout...), certaines valeurs dites féminines y auront probablement plus d'importance qu'aujourd'hui. Bonne soirée à Montréal !
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N
Pour ce qui est des femmes elles font autant partie de l'Humanité. Je dirais même qu'elles l'écrivent, que génétiquement elles le transmettent à leur fille.Il faut apprendre des femelles alphas des Bonobos.Quand la société sera matriarcale..je crois naivement qu'il n'y aura plus de violence et de guerre..qu'elle femme veux que son fils parte à la guerre?!J'adore tes montées de lait luciaMel..ton indignation est tellement en dehors du convenu.Nos instincts semblent jumellés  :)
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L
@Olympe : oui, tu as raison, pour éviter la "généralisation" un adverbe aurait été ici nécessaire : "parfois"... ou "souvent"... (j'ai corrigé). L'exemple d'Aubry et de Royal, étant là pour l'illustrer, ainsi que celui de cette femme tenant les jambes d'une jeune fille (sa fille ?) plaquée au sol, tandis qu'un homme la frappe (vidéo qui fait un buzz au Pakistan). Les hommes sont rivaux entre eux, aussi, mais ils savent mieux que nous s'allier et se soutenir, en cas de besoin ("battre" une femme par exemple), ils en ont une longue expérience, les femmes n'ayant que celle d'avoir été dominées, et, on le sait, la loi du plus fort étant souvent la meilleure... elles ont souvent été (et le sont encore) les complices (forcées ?) de beaucoup d'abus contre une des leurs. Tu ne crois pas ?
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L
@Olympe : c'est ce que je souhaite moi aussi, chaque fois qu'une femme me tend la main je la serre et je m'enthousiasme (comme Micelle Obama et la Reine d'Angleterre ). Je dois dire que malheureusement dans ma vie professionnelle (pas dans ma vie privée), les femmes ne m'ont pas fait de cadeau (j'évolue dans un milieu très féminin), j'ai souffert d'entendre les femmes tenir des propos sexistes (car il ne s'agissait pas d'analyse politique) sur Ségolène Royal. Je dirai, pour reprendre l'article de Philippe Meirieu (repris dans Vendredi) que la plus belle image du film La journée de la jupe, est celle où la jeune lycéenne (beur) prend la défense de sa prof, et, se saisissant du pistolet, se révolte contre l'ordre machiste de son milieu. Rien de plus beau qu'une femme qui comprend qu'elle se défend elle-même en défendant une autre femme... Aussi beau qu'un homme qui en défend un autre.
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O
Les femmes sont des rivales les unes pour les autres, elles sont certainement beaucoup moins solidaires que les hommes entre euxpersonnellement ça ne correspond pas à mon expérience. en tout cas on ne peut pas généraliser ni dans un sens ni dans l'autre
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