Une lady, tout simplement
Publié le 19 Juin 2009
Et soudain, alors que vous rentrez d'un cocktail chez Ladies Room... que vous avez bu quelques coupes de champagne (des flûtes plus exactement) mais point trop (3... 4...), il est 23h et une voiture s'arrête près de vous juste après la Fontaine aux Innocents.
- Pardon, excusez-moi...
Je regarde à l'intérieur, des hommes jeunes, assez élégants, origine, comme moi, "métissée" (mélangée de cultures). Je leur réponds.
- Oui ?
- Dites... vous ne seriez pas une femme Barbara Gould ?
- Ah, très bon !!!
Je leur souris et leur fais un signe d'au-revoir en fermant la paume de la main.
Ca c'était hier. Ce soir, l'ambiance était tout autre. Je sentais vaguement que le blues me gagnait. Je sors, je vais au théâtre, je pense à toi qui l'aimais tant... le théâtre. Bon, je ne vais pleurer, je vais vivre, pour toi... aussi.
Dans le métro, tous m'horripilent, l'hypocrisie suinte de partout, les vies que les gens portent sur leurs visages, leurs vies si apprêtées... ce couple d'homos par exemple, fraîchement débarqués d'un voyage en Amérique latine, des Narcisse en goguette, et ce couple d'hétéros... qui ont l'air de tout faire pour cacher qu'ils ne se supportent plus. Bref, j'étais d'une humeur de chien et tout, autour de moi, prenait une coloration grise et triste...
Dans le wagon, pourtant, deux personnes ont fait palpiter mon coeur, une femme enturbannée, le crâne chauve en dessous... une chimio probablement, près d'elle son compagnon. Et, assis sur un strapontin, un clochard, noir de surcroît... faisant le vide autour de lui (or il ne sentait pas mauvais). Soudain, je vis ses pieds... comme les tiens par moments, ils étaient enflés par des oedèmes, l'empêchant de chausser ses souliers. Alors j'ai pleuré d'amour, de compassion, pour cet homme, cet humain, cet être vrai près de moi... j'ai pleuré discrètement.
Puis j'ai assisté au Lucernaire au spectacle conseillé par MyaMya, Marianne : Kvetch.
Et là, j'ai plongé dans la vraie vie... la nôtre, celle où les hypocrisies seraient dévoilées. Etonnant spectacle de pantomime immobile (scènes figées) et de jeu d'acteurs hyper-réglé et très libéré. Là aussi, des couples, des âmes rabougries dans leurs coquilles... mais avec une tendresse tout humaine pour ces personnages à notre image.
Autant le dire : j'ai adoré ! et je vais certainement y retourner. Pour l'humour, la truculence (des enfants près de moi riaient de bon coeur aux gros mots dits sur scène, c'était une sorte d'avant-première et ces enfants étaient sans doute des proches des acteurs...) et comme dans Oxu et Xu (vus récemment au Théâtre du Rond Point, invitée par une amie actrice), il semblerait qu'un amour désabusé de la vie, à la fois ironique et tendre, inspire le choix des metteurs-en-scène actuels.
Ca m'a fait tellement de bien. Au retour, dans le métro, mes larmes (qui décidément ne voulaient pas me quitter) étaient celles de la peine que tu n'aies pas pu assister à une aussi belle pièce, que tu ne puisses pas être là pour admirer ce beau coucher de soleil sur les toits de Paris... Allez, je me dis que là où tu es c'est bien plus... serein, et que tu es tout aussi peinée de me voir encore souffrir de cette vie...
Voici ces chansons surgies de mon blues et interprétées par ton nouveau copain, ton voisin de tombe... Alain Bashung (tous les deux, je le sens, vous devez bien vous amuser de l'autre côté; vous et vos "mots bleus"... vous l'avez bien cherché, vous êtes tous les deux enterrés à la "division romantique"). Alain et Elisa... qui s'éclatent au Père Lachaise... "On est loin... des amours de loin... on est loin..."
Textes et photos (c) Luciamel