Un enfant... et sinon ?
Publié le 22 Septembre 2009
Photo (c) Luciamel
Je me retiens depuis plusieurs jours... car je me dis que ça va m'attirer les foudres de moult femmes... et de nombreux de mes amis. Mais après tout, pourquoi tenir un blog, si ce n'est pour surprendre ses amis, et les femmes ?
Le taux de natalité en France est parmi les plus élevés d'Europe... environ 2 enfants par femme... (quel exploit !), comme elles ont sacrifié leur vie professionnelle pour les élever... (euh ? ah bon ? encore aujourd'hui ? vraiment obligées ? la contraception, les crèches... c'est du bidon ?), il est normal qu'au moment de la retraite on les récompense de l'effort consenti pour la nation. Ah ? c'est vraiment ça l'égalité ? qu'on nous dédommage... qu'on nous reconnaisse, en quelque sorte, une différence... une particularité sociale, évaluant par là-même la domination...
Moi, je croyais que l'égalité c'était d'avoir les mêmes droits, le même salaire pour le même travail, et si je m'arrête pour élever mon enfant (que je sois un homme ou une femme) qu'effectivement, dans ce cas-là, on le compte comme un travail. Si je ne m'arrête pas... parce que les services sociaux me l'ont permis, parce que j'ai pu le placer en crèche, il n'y a aucune raison pour qu'on me "dédommage"... de mon "incident" (?) de parcours.
J'aimerais rappeler que de nombreuses femmes (moins en France que dans d'autres pays d'Europe, soit ! ) n'ont pas d'enfant, qu'elles n'en sont pas moins des femmes (tout aussi dominées), qu'elles ne sont pas plus payées pour autant (je le vois autour de moi, mes collègues mères reçoivent exactement le même salaire que moi, et elles ont plus d'avantages, parce qu'elles ont des enfants : tant mieux pour elles, bien évidemment). Femmes sans enfant, vous devrez travailler 41 ans pour obtenir une retraite complète, vous toucherez 25% de moins que ces Messieurs pour le même travail, mais vous n'aurez aucune compensation, car vous n'avez pas donné d'enfant à la nation !
Travail, famille, patrie... quand tu nous tiens.
Inégalité entre les femmes, oui. Peu de solidarité entre elles, aussi. Se battre pour que les droits des mères soient reconnus, sans aucun doute, mais j'aimerais que du coup on ne jette pas aux orties toutes celles qui n'ont pas procréé. Elles aussi ont été moins payées tout au long de leur carrière, elles aussi ont dû se confronter au monde du travail, plus favorable aux hommes. Elles ont été parmi celles qui se sont battues pour le droit à l'avortement, à la libre disposition de leur corps, et peut-être au droit à ne pas avoir d'enfant, et à pouvoir vivre "seules" et libres. Dans notre beau pays de la natalité ça semble être devenu un péché...
Femmes non-mères, c'est donc vous qui paierez.
Alors, je le dis, si par le passé cela a pu se justifier, aujourd'hui ce dédommagement me semble non une revendication de l'égalité homme-femme, mais une politique réactionnaire tendant à perpétuer un vieux modèle : les femmes à la maison avec les enfants, les hommes dans la cité.
Battons-nous non pour avoir des compensations, mais bien pour une reconnaissance de nos droits humains.
Nous avons le choix d'avoir, ou non, un enfant (et parfois nous ne le pouvons pas), nous devons faire en sorte que notre valeur professionnelle et humaine soit reconnue en tant que telle, non parce que nous sommes mères...
Si les conditions de garde ne sont pas suffisantes, battons-nous; si nos salaires sont insuffisants, battons-nous; si nous devons nous arrêter de travailler pour élever notre enfant, battons-nous pour être rémunérées pendant cette période; si nous nous retrouvons abandonnées par le père, demandons assistance à la société. Mais, surtout, ne confondons pas liberté, égalité et maintien dans une situation d'infériorité (celle qui est à l'origine de la domination masculine sur les femmes : équilibrer par plus de pouvoir social ce pouvoir si mystérieux qu'est celui des femmes, de procréer - au sens de porter un enfant et d'accoucher...).
Je conçois qu'il faille encore une période de transition, attendre d'avoir l'égalité pour supprimer cet avantage accordé pour le décompte des annuités, mais, sachons-le, ça laisse aussi beaucoup de femmes sur le bas côté du chemin...