Portée par l'allégresse et la douceur de vivre
Publié le 17 Novembre 2010
Arrivée par Lamarck-Caulaincourt, je ne me suis pas méfiée... j'ai remonté vers la Place Dalida, c'était déjà la nuit tombée, c'était l'inverse du chemin d'autrefois, mais j'ai bien retrouvé comment aller j'usqu'au Moulin de la Galette. Et puis, j'ai attendu un certain temps que le Ciné 13 Théâtre ouvre. Quel beau quartier, et quelles belles gens. Des enfants comme du temps de Doisneau ou de Poulbot, sauf que, là, les enfants qui jouaient au ballon dans la rue étaient d'un tout autre milieu... beaucoup plus favorisé. Comme ceux qui sont près de moi, devant la salle de spectacle. Des bobos, ça va de soi, et, qui plus est (plus grave ?) des jeunes...
Au bar, j'ai pris un verre, de rouge, s'il vous plaît... sauf qu'il était imbuvable, je l'ai rendu... au serveur, en lui demandant, si cela lui était possible, de me rembourser. Je me suis contentée d'un verre d'eau du robinet.
Les conversations allaient bon train, c'est fou quand vous êtes seul(e) comme vous entendez tout ce qui se dit autour de vous.
"Anne-Sophie m'a dit : "Mais il vient de banlieue, il a peut-être un couteau sur lui !", oui, c'est vrai, mais j'ai voulu être tolérant. (...) Alors, cet homme couché dans le couloir tous les soirs, je devais l'enjamber... je n'osais lui demander de partir... en plus, un soir il y avait un orage dehors (...) sauf qu'un jour je l'ai vu près de mon fils !!! alors là, je lui ai dit qu'il devait déguerpir. Je suis allé à la police et j'ai fait une main courante".
"Alors, elle, je l'ai entendue à [nom d'un concours oublié] à l'Olympia, c'était pas mal. Et puis, il y avait aussi Camila Jordana.
- Ah, elle, je l'adore."
Enfin, on est entrés dans la salle. Belle, fauteuils hyper confortables. Demoiselle est venue, précédée de ses fiancés.
Il m'a fallu une chanson pour commencer à pleurer...
Car, soudain, sa voix m'a fait voir... m'a fait entendre et percevoir ce que sa vie à fleur de peau chante.
Une fiancée, dit-elle, une amoureuse de la mort... une joyeuse-luronne, une funambule de la douleur.
Je l'ai bien reconnue, et je t'ai aperçue, à travers elle... je t'ai entendue.
Les larmes sont venues quand j'ai trouvé votre ressemblance, mais, déjà, je l'avais discernée sur la photo de Aung San Suu Kyi. Je te vois partout ? Non. Je te vois là où tu parais. Tu as vécu à la Maison sur Seine, dans le service des soins palliatifs pendant une, puis deux années (par intermittence), au Métro Lamarck-Caulaincourt. Je venais te voir dès que je le pouvais, de la Place Clichy, par la rue Lepic, puis tout droit jusqu'au Moulin de la Galette, à la Place Dalida je descendais l'escalier, et c'était là, tout en bas. Tu m'as fait refaire le chemin à l'envers... Tu m'as fait admirer cette jeune femme si mignonne, si professionnelle, si légère et si grave à la fois. Sa coupe au carré. Tout en elle était ton portrait. Toi qui aimais tant le théâtre, le spectacle, toi qui as fait les costumes pour Yaël Naim sur les 10 Commandements, toi, qui as travaillé au festival de Carcassonne pendant des années, qui as participé au spectacle de la Cage aux folles, qui avais la charge de l'entretien des costumes à Beaubourg... Voilà, que je pleure encore...
Ceux qui t'ont connue sauront que je dis vrai en voyant le clip de La fiancée.
Elle, qui vit sur le fil... qui parle de la mort, de sa mort... de son départ, comme d'une délivrance... Elle qui sautille, pétille en disant des mots qui coupent aussi imperceptiblement que la lame d'un rasoir. J'ai tressailli aussi quand j'ai entendu le début de sa reprise de la chanson d'Etienne Daho. Ces paroles résonnaient en moi, devenue tambour.
Ouverture.
Etienne Daho.
Il est des rendez-vous,
Pas de coïncidence,
Aller vers son destin,
L'amour au creux des mains,
La démarche paisible,
Porter au fond de soi,
L'intuition qui flamboie,
L'aventure belle et pure,
Celle qui nous révèle ,
Superbes et enfantins,
Au plus profond de l'âme.
(...)"
A toi, ma soeur, j'ai bien entendu les derniers mots... de cette soirée, et ils furent ceux-ci :
Et la douceur de vivre,
De l'été qui commence,
La rumeur de Paris,
Comme une symphonie,
Comme la mer qui balance.
J'arrive au rendez-vous,
Dans l'épaisse fumée,
Le monde me bouscule,
Réfugiée dans un coin,
Et observant de loin,
La foule qui ondule,
Mais le choc imminent,
Sublime et aveuglant,
Sans prévenir arrive.
Je m'avance et je vois,
Que tu viens comme moi,
D'une planète invisible,
Où la pudeur du cœur,
impose le respect,
La confiance sereine
Et plus tu t'ouvres à moi,
Et plus je m'aperçois,
Que lentement je m'ouvre,
Et plus je m'ouvre à toi,
Et plus je m'aperçois,
Que lentement tu t'ouvres.
il fut long le chemin,
Et les pièges nombreux,
Avant que l'on se trouve,
Il fut le long le chemin,
Les mirages nombreux,
Avant que l'on se trouve.
Ce n'est pas le hasard,
C'est notre rendez-vous,
Pas une coïncidence."