MDB n° 3 : Montmartre de Beauvoir
Publié le 30 Mars 2011
Claudine Monteil, dessin de Simon Gaetan, photo (c) Simon Gaetan
Elle avait 20 ans. Simone de Beauvoir, 62. C'était en 1970. Vous, les jeunes, vous pouvez compter : ça fait 41 ans. Aujourd'hui elle va avoir 62 ans. Le temps est passé car il a passé. Les soeurs sont mortes (Simone et Hèlène), ses amies. Sartre aussi. Elle s'embrase face à nous. Elle s'extasie de tout ce passé. On le revit à travers ses yeux qui brillent, on les entend dans sa voix, eux qui se sont enflammés pour changer le monde qui est maintenant le nôtre. Elle nous dit ce qu'elle même est devenue : "Simone de Beauvoir parlait d'égal à égal, en regardant droit dans les yeux". "Beauvoir était obsédée par le temps, car Sartre et elle étaient des intellectuels extrêmement sollicités".
Claudine Monteil nous a fait la gentillesse, et l'honneur, de partager avec nous, simplement et humblement, ses souvenirs, ses combats, ses espoirs, ses craintes. A l'occasion de notre MDB n°3, notre Montmartre des Blogueuses, nous femmes des années 2000, elle femme des années 2000, car pour moi elle n'est pas une "féministe des années 70", elle est féministe d'aujourd'hui, comme Beauvoir à 62 ans dans les années 70, était l'une de celles qui ont superbement servi la cause des femmes en leur temps, pour le nôtre.
Elle nous a bien sûr rappelé les luttes du passé, celles qui semblent acquises et qui pourtant sont encore en sursis...
"En 68, pendant la Révolution, seuls les hommes s'exprimaient, c'était ces Messieurs (Cohn Bendit, etc.) plus Sartre, les femmes avaient le droit de se taire et de distribuer des tracts".
Le manifeste des 343, la mise au banc de la société à l'époque, mais encore aujourd'hui le stigmate d'avoir été une de ces 343... Défendre l'avortement, défendre Marie-Claire dans son procès à Bobigny, c'était pour toutes ces femmes-courage (matraquées à l'Opéra par les motards de la police) une prise de risque sociale très forte. Simone Veil, oui, mais surtout elles toutes, elles intellectuelles, écrivaines, actrices, avocates, elles femmes solidaires témoignant de leur avortement à la Mutualité, avant.
Elle nous a secouées Claudine Monteil, elle semblait encore animée par l'enthousiasme de ces années où combattre n'était pas un vain mot, où combattre n'était pas désespéré... Nous l'avons connu ce temps-là nous aussi, à peine un peu plus jeunes qu'elle pour certaines, nous nous souvenons de l'enthousiasme à croire que nous allions y arriver... à changer le monde.
Elle nous a étonnées en nous redonnant espoir, en nous conseillant : "Tournez-vous vers les mouvements nordiques, infiltrez les organisations, les femmes qui s'en sortent aux Etats-Unis sont les auto-entrepreneuses, oui, mieux vaut le Women's Forum que rien".
Et puis, cette référence à un ouvrage de Simone de Beauvoir : La vieillesse. Presque prémonitoire, pleinement d'actualité, où l'auteure du Deuxième sexe se penche sur la condition des vieux, défend leur cause... un pavé de 600 pages, à (re)découvrir.
Les présentes à ce MDB étaient (dans le désordre de mes notes) :
Augustine Blaisdelle, écrivaine étatsunienne, sans blog... mais avec stylo.
Les diablogues du vagin, Léa Lejeune
Le blog d'une femme de sportif
et notre portraitiste :
Dessins de Simon Gaetan, au MDB 3, le 29 mars 2011, au Just be, photos (c) Simon Gaetan